Les trésors du carton : épilogue

Le carton du brocanteur, avec les Mémoires de la Princesse, les bandes magnétiques et les autres découvertes que j'ai décrites ici, m'ont occupé pendant plusieurs mois. On a vu que le tapuscrit des Mémoires a été confié à un éditeur roumain, et que les bandes magnétiques semblent malheureusement inexploitables. Où en sont les choses aujourd'hui ?

Par Alain Chotil-Fani

L'édition de "mon" tapuscrit

 

Comme je l'ai écrit précédemment, nous avons eu la surprise de voir les Mémoires d'une Princesse Moldave publiées, dans une version bilingue, par un petit éditeur roumain... étrange coïncidence alors que je venais de retrouver et de transmettre à Bucarest le tapuscrit que j'avais retrouvé ! Mais je ne compte plus les bizarreries dans cette étrange affaire.

Bref, mon contact roumain, aussi surpris que moi, a alors décidé d'abandonner son projet de publication.

Mais comme cet ouvrage "concurrent" reste résolument introuvable en librairie, il était, aux dernières nouvelles, question de relancer le projet d'exploitation de "mon" tapuscrit.

Je précise que je n'ai aucun intérêt (financier ou autre) dans ce projet de publication, et que j'ai cédé tous les droits à mon contact roumain. Voilà ce qui explique aussi pourquoi je ne sais pas avec précision ce qu'il en est de cette édition et que je profite de mes rares visites à Bucarest pour venir aux nouvelles.

L'exploitation des bandes

 

Autre sujet d'étonnement : aucune maison de disque ne s'est penchée sur l'exploitation de tels trésors, puisqu'apparemment les bandes originales existent et sont propriété du musée Enesco !

Cela dit, rien n'interdit que quelque maison de disque spécialisée dans l'historique, comme il en existe aujourd'hui plusieurs dizaines, se préoccupe de ce témoignage et fasse enfin un report sur CD. N'étant pas forcément au courant de toutes les nouveautés discographiques, je serai heureux d'avoir toute (bonne) nouvelle à ce sujet !

À noter qu'il y a d'autres célèbres inédits d'avant-guerre d'Enesco : en tant que chef, il a notamment enregistré un disque de musique roumaine, à la tête de l'Orchestre Philharmonique de New-York. On peut même voir la pochette d'une cassette audio de ce concert au musée Enesco de Bucarest ! mais, à l'intérieur du boîtier, la cassette a disparu, et personne ne semble l'avoir. Encore un beau gâchis !

Fin de l'aventure ? Raison d'être de ce site

 

L'aventure, aujourd'hui est au point mort, et laisse un sentiment d'inachevé : l'édition officielle des Mémoires a eu lieu, mais n'est disponible nulle part ; les bandes originales du concert américain d'Enesco existent, mais aucun mélomane ne peut les écouter !

Si j'ai décidé de mettre ces événements par écrit, sur un site public, c'est pour tenter une nouvelle fois de faire bouger les choses. Il y a sûrement des internautes, de Roumanie ou d'ailleurs, qui pourront apporter leur pierre à la résolution de ces énigmes...

Je tiens à préciser que j'ai mis très peu de personnes au courant de ce matériel. Uniquement des gens de confiance, et que je tiens à remercier de leur soutien et conseils avisés. Je n'ai pas fait la moindre publicité autour de cette affaire que j'ai tenté de traiter sereinement, partant du principe qu'un matériel vieux de plusieurs dizaines d'années pouvait bien attendre quelques mois de plus pour être exploité.

Quand j'ai rédigé les différents chapitres de ce site, j'ai volontairement évité de citer le nom de mes interlocuteurs et gommé tout ce qui pouvait être polémique.

Il paraît clair que l'enjeu dépasse le seul cadre artistique. Il s'agit là d'une partie de notre histoire commune avec la Roumanie. Le destin d'Enesco et de la Princesse Cantacuzino est à l'image de la Roumanie des années 1880 - 1950. Ce qui touche de près ou de loin à ce matériel ne peut qu'être lié à cette histoire encore récente, dont les prolongements sont encore très sensibles.

Pendant cette période, la Roumanie prend peu à peu son essor au sein de l'Europe, réussit enfin à émerger en tant qu'entité indépendante. Après l'aventure fasciste des années 1930, la Roumanie tombe, suite à la seconde guerre mondiale, dans les griffes de son nouvel allié soviétique.

Enesco et la Princesse disparaissent, en exil, bien des années avant qu'éclate une Révolution qui n'a pas permis de répondre à toutes les interrogations sur une dictature d'un demi-siècle.

Souvenons-nous des cicatrices encore ouvertes de la seconde guerre mondiale dans un pays comme la France, des éclats du procès Papon, de tous les non-dits autour de la collaboration ou de la guerre d'Algérie. Et pourtant nous vivons en démocratie depuis la Libération. On comprendra peut-être pourquoi la situation des Roumains est si difficile. Il faudra encore bien des années, de nouvelles générations, pour prendre la mesure ce traumatisme et faire le deuil de cette barbarie.

Maruca a sous-titré ses Mémoires "Ombres et Lumières". Si l'histoire de sa vie, et de la Roumanie qu'elle a connue, connaissent quelques belles lumières, nous savons aujourd'hui que toutes deux s'achevèrent dans les plus profondes ténèbres.

Accueil