Václav Smetáček et Má vlast de Bedřich Smetana

Le cycle symphonique Má vlast (Ma patrie) de B. Smetana (1824-1884), composé entre 1872 et 1879 auquel appartient le poème symphonique Vltava, nom du fleuve qui traverse Prague (souvent connu en France malheureusement sous le nom allemand de Moldau) et fait la fierté de ses habitants, occupait une place à part au sein du répertoire préféré de Václav Smetáček. Il transmis sa passion pour ce cycle symphonique à bien des orchestres tchèques et étrangers. Chaque interprétation jusqu'à la dernière, était pour lui l'occasion d'une nouvelle étude très détaillée et de nouvelles découvertes, notes, indications qu'il n'avait pas remarquées précédemment. V. Smetáček dirigea souvent l'oeuvre à la salle Smetana à Prague avec l'orchestre FOK. Ce cycle inaugurait d'ailleurs chaque saison et se jouait en plus lors de fêtes. On peut s'imaginer l'effet produit par cette musique sur la population tchèque dans les années 1940-1944 et avant la fin de la guerre, en janvier 1945, quand les discours patriotiques étaient sévèrement réprimés pour des raisons d'occupation nazie. Je me souviens aussi de Má vlast au début du mois de septembre 1968 peu de temps après l'invasion des tanks soviétiques.

« J'ai dirigé hier Má vlast dans la salle de la Maison des Artistes. La Philharmonie Tchèque inaugurait la nouvelle saison. Elle joua dans sa formation au grand complet avec ses 8 cors et ses 6 trombones. La télévision retransmit tout le concert. Celui-ci revêtait un caractère solennel exceptionnel et l'enthousiasme dans la salle et dans l'orchestre fut magnifique. Le concert remplit son objectif et démontra l'intensité de l'oeuvre de Smetana dans ces instants de honte et d'asservissement national que le gouvernement russe avait infligé à ses frères tchèques et slovaques. Ma mère suivit la retransmission et elle me dit ces mots lorsque nous arrivâmes à la maison : « Mon garçon tu y as mis tout ton être, tu t'es surpassé ». Et c'était vrai...

En 1954 Václav dirigea Má vlast pour la première fois à l'étranger avec l'orchestre de Katowice en Pologne. Plus tard ce fut le cycle intégral à Dresde et Berlin. Il donna l'oeuvre encore à Vienne, Salzbourg, Francfort, Hannovre, Münich, Nüremberg, Schwerin, Montréal, Stuttgart, Buenos Aires... Il l'enregistra pour la radio allemande à Hambourg et Stuttgart. Má vlast reçut un accueil exceptionnel au Royaume-Uni. La plus grande partie des auditeurs des concerts découvrait pour la première fois l'intégralité du cycle et Václav n'avait de cesse non seulement de son succès auprès des mélomanes mais aussi de la faire jouer par les musiciens avec beaucoup d'attention et d'enthousiasme et que les critiques lui accordent leur plus grande estime.

« La salle des congrès était pleine à craquer et le concert lui-même me surprit. Je ne pouvais pas m'imaginer que le cycle Má vlast pourrait provoquer un tel enthousiasme en Allemagne. L'orchestre joua admirablement, sans doute l'un des meilleurs orchestres de tous ceux que j'ai dirigés, comparable aux plus grands. Le succès fut impressionnant, les gens auraient pu faire s'écrouler la salle... Quel soir de fête ! »

Puis vint le temps de l'enregistrer.

Source

  • « Zivot staktovkou » de Míla Smetáčkova (Editions Universum Prague 1991)
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